lundi 30 juillet 2012

Le retour des poules en ville

©Globarchi Association
En moyenne, 30% du volume de nos poubelles est constitué de déchets alimentaires. De nos jours, il existe une solution ultramoderne permettant de réduire totalement ce gaspillage de nourriture et le surcoût financier engendré : la poule. Que ce soit du temps des Romains, de la Grèce ou de l'Egypte antique, l'homme a toujours domestiqué la poule. Depuis quelques années, des chercheurs s’intéressent aux nombreuses vertus que cet animal peut apporter dans les milieux urbains.


La poule n'est pas un animal difficile. Une grande partie des déchets organiques issus de la préparation des repas et des fonds d'assiette produits par les foyers, les collectivités où les restaurants lui correspondent parfaitement. Cet animal de compagnie peut ingérer à elle seule 150 à 200 kg de nourriture par an. Elle produit dès lors des œufs frais directement consommables et naturellement plus sains que ceux de nos élevages industriels. En plus du recyclage des déchets ménagers, la poule permet donc de produire sa propre nourriture, de savoir exactement la provenance des œufs, de consommer des produits frais, de fertiliser les jardins, de produire une nourriture biologique, d'élever des poules de différentes races (et pourquoi pas d'en faire une collection), de s'en servir comme un animal de compagnie et de créer un lien social avec le voisinage... Près des potagers, elle servira d'auxiliaire agricole. La poule se nourrit des nuisibles comme les escargots, les limaces (...) et même des insectes.

Mais les poules doivent faire face à l'interdiction de l'élevage citadin parfois en place dans les municipalités. Des villes comme New-York, Seattle, Los Angeles, Ottawa, Vancouver, Toronto, Chicago, Montréal où Nantes se sont rendues compte de l'importance de ce formidable moyen de recyclage en autorisant les citadins à posséder un poulailler. A Nantes, capitale verte Européenne en 2013, l'agence de designers «Faltazi» a élaboré le projet «Ekovores». Partis du constat que nos villes sont dépendantes alimentairement de l'importation (provenant souvent de pays étrangers) et que nos villes n'ont aujourd'hui aucune autonomie alimentaire, les designers ont réalisé une réflexion autour du lien entre producteurs et consommateurs. Pourquoi ne pas produire en ville et dans sa périphérie ? L'objectif étant de façonner une cité auto-suffisante «capable d'encaisser les déchets et les valoriser».

Principe des "Ekovores" ©Les Ekovores
De beaux projets ont émergé de cette réflexion comme des «fermes d'urgence» autonomes en périphérie, des serres maraichères, des jardins familiaux flottant, des ruches urbaines, des barges marchées, des récupérateurs d’eau en façade… Pour la production en ceinture verte de la métropole de Nantes, l’équipe de designer a conceptualisé des «modules paysan inoxydables» pouvant accueillir jusqu'à 64 poules. Chacune disposent de sa propre couveuse accessible grâce à une rampe. Le tout est ventilé grâce à des aérations placées en partie haute. Un accès central permet à l’agriculteur d’accéder facilement aux œufs pondus. Dans leur projet, Faltazi a même pensé à mettre en place des poulaillers «garderies». Les habitants de Nantes disposant d’un jardin auraient la possibilité d’acquérir deux poules. Lorsque les citadins partiraient en congé, ces derniers auraient la possibilité de faire garder leurs poules dans des poulaillers «Cocottes», véritable paradis des poules : «Parcours 3D, soins vétérinaires d’excellence, chaque cocotte est dorlotée jusqu’au retour de ses propriétaires». Pour le restant des déchets biodégradables non consommé par les poules, l'équipe de designers a même imaginé des composteurs urbains pour les valoriser.

La poule a donc de beaux jours devant elle…

Perspective d'un poulailler en ceinture verte ©Les Ekovores
Perspective d'un poulailler en ceinture verte ©Les Ekovores

Coupe d'un poulailler ©Les Ekovores
Perspective d'un poulailler "Cocotte" ©Les Ekovores
Perspective d'un poulailler "Cocotte" ©Les Ekovores

Pour en savoir plus :
- Le projet « Ekovores » à Nantes : www.lesekovores.com
- L'équipe de designers « Faltazi » : www.faltazi.com
- Page de "Nantes, élue capitale verte de l'Europe par la comission Européenne pour l'année 2013" sur le site internet de la mairie de Nantes : http://www.nantes.fr/dev-durable/actualites durable/capitale_verte_europe

mercredi 11 juillet 2012

Le Triangle Vert



Saulx les Chartreux ©Le Triangle Vert

Le Triangle Vert des Villes Maraîchères du Hurepoix, né le 27 juin 2003, est une association de loi 1901 réunissant les communes de Marcoussis, Nozay, Villebon sur Yvette, Saulx les Chartreux, Champlan ainsi que les exploitants agricoles motivés par le projet. Cette association a pour objet de constituer une structure de réflexion et de communication entre municipalités, agriculteurs, et usagers de l’espace.





L’Île de France : une région rurale
Le Triangle Vert est situé en Essonne dans un territoire principalement agricole. A 20 kilomètres de Paris, il fait partie de la ceinture verte où émergent des projets d’agriculture périurbaine, montrant la volonté sociale de préserver des espaces ouverts dans le tissu urbain. Ces projets répondent à plusieurs besoins : préserver un cadre de vie, pouvoir se ressourcer dans des lieux à proximité de chez soi, favoriser la production agricole locale, profiter de paysages encore ruraux, limiter l’étalement urbain.

La position du Triangle Vert dans l'Île de France ©Globarchi Association

- 80 % du territoire sont des espaces naturels, agricoles ou boisés.
- 45% sont des terres agricoles.
- Une des terres les plus fertiles d’Europe.
- 100 000 ha de terres fertiles ont disparu en l’espace de 50 ans au profit de l’expansion urbaine.
- Les terres agricoles destinées à l’alimentation locale ne représentent que 12% des terres cultivées.
- L’Autonomie alimentaire de l’Île de France est de seulement quelques jours.

La Ceinture Verte de Paris
La Ceinture Verte représente un territoire stratégique pour l’aménagement de l’Ile-de-France. Zone de contact entre l’agglomération parisienne et la couronne rurale, elle regroupe les territoires situés dans un rayon de 10 à 30 km du centre de Paris.

La Ceinture Verte de Paris ©Globarchi Association
- 60 % d’espaces ruraux, en grande partie agricoles (40 %).
- Entre 1979 et 2000, la surface agricole utile a diminué de 19 % et le nombre d’exploitations agricoles y est passé de 3 300 à 1 300 soit une baisse de 60 %.
- Entre 1982 et 2003, l’urbanisation s’est réalisée pour l’essentiel sur les terres agricoles et 38 700 ha d’espaces naturels et agricoles ont été consommés.

Des projets agri-urbains dans la Ceinture Verte de Paris

1 Le Triangle Vert
2 Centre Essonne
3 Sénart
4 Plateau Briard et vallée du Morbras
5 Marne et Gondoire
6 Plateau de Cergy
7 Vernouillet
8 Plaine de Versaille
9 Plateau de Sarclay                                    ©Globarchi Association

Ce sont des projets d’agriculture péri-urbaine qui émergent, montrant la volonté sociale de préserver des espaces ouverts dans le tissu urbain. Ils répondent à plusieurs besoins :
- préserver un cadre de vie.
- pouvoir se ressourcer dans des lieux à proximité de chez soi.
- favoriser la production agricole locale.
- profiter de paysages encore ruraux.
- limiter l’étalement urbain.

Le Triangle Vert fait partie de cet ensemble de projets d’agriculture périurbaine, il est essentiel d’encourager son projet de territoire afin de composer au niveau régional cette nouvelle couronne agricole.

Un territoire multicommunal
Quelques données :
- 20 km de Paris
- 5 municipalités : Marcoussis, Nozay, Villebon sur Yvette, Saulx les Chartreux, Champlan
- 28 573 habitants
- 4 282 ha au total
- 40% d’espaces agricoles
- 26% d’espaces naturels (forêts)
- 24% espaces urbanisés
- ≈ 30 exploitations viables à long terme

Les 5 communes du Triangle Vert ©Globarchi Association
Un territoire à fort potentiel
Le territoire du Triangle Vert possède un fort potentiel lié à ses paysages naturels (forets, parcs, ruisseaux) et agricoles. Sa situation est les infrastructures routières présentent également des atouts.

Potentiel du Territoire ©Globarchi Association

L'association

Dès 2001, Brigitte Bouvier et Thierry Laverne, concernés par les problématiques urbaines et paysagères de leurs communes, commandent des études à l’agronome André Fleury. Les différents diagnostics sur l’agriculture font apparaître une fragilité de l’activité agricole, encore bien présente, et un certain pessimisme des agriculteurs face aux contraintes engendrées par la localisation périurbaine de ces exploitations, qui en menacent la durabilité. Convaincus de leur capacité d’agir avant qu’il ne soit trop tard, les élus locaux se rendent rapidement compte de la nécessité de considérer l’agriculture à une échelle plus large que celle de la commune.
L'association est crée en 2003. La forme associative permet de réunir tous les acteurs du territoire afin de définir et de mettre en place les démarches à suivre afin de préserver la nature, les activités agricoles et penser l’urbanisation des cinq communes.

De nombreuses actions sont conduites par le Triangle Vert et ses membres : maîtrise foncière, itinéraires de découverte de l’agriculture, sensibilisation des enfants, opérations de nettoyage, tests de techniques innovantes, protection des cultures sensibles, remise en culture des friches, travail sur les circuits courts de distribution des produits, expositions, promenades commentées etc.

Selon le président de l’association, Thierry Laverne, « le projet d’agriculture urbaine du Triangle Vert est fondé sur la volonté de mettre en oeuvre un projet de développement qui parie sur le maintien de la qualité de nos territoires, de leurs activités et de leurs paysages. Cette orientation fondamentale choisit de replacer durablement l’homme et son avenir au coeur de notre projet et de nos choix de développement ».

L’objectif du triangle Vert est de rassembler tous les acteurs périurbains pour créer ensemble le projet de territoire. Ainsi, le projet du Triangle Vert se base sur l’analyse du site.


Rôles du Triangle Vert
- Outil à la disposition des communes de protection du foncier face au front de l’urbanisation.
- Développer l’agriculture de proximité
- Renouer un lien avec les agriculteurs
- Produire du paysage et maintenir la qualité de vie du territoire périurbain.
- Maintenir une agriculture maraichère contre des céréalicultures intensives globalisées sur le territoire français.

La polyfonctionnalité et le fonctionnement plus local du maraichage peuvent devenir un vrai pôle économique, générant des emplois. En 2003, 90% des surfaces agricoles utiles sont des cultures céréalières intensives.

Les principes du développement durable et de l’urbanisme écologique cherchent à prendre en compte les enjeux sociaux, économiques, environnementaux et culturels de l’urbanisme pour et avec les habitants. Plus précisément, il s’agit de :
- Faire participer les habitants
- Lutter contre l’étalement urbain
- Diversifer des moyens de transports
- Protéger l’agriculture, le paysage
- Développer les filières courtes : agriculture de proximité, entreprises d’écomatériaux locaux, ...
- Protéger la biodiversité

Leur gouvernance se fait généralement suivant le principe de l’Agenda 21 local, incluant des modes de démocratie participative et parfois un objectif d’autarcie énergétique voire alimentaire. À plus petite échelle on parle d’écovillage.

Dans son article « Manière de classer l’urbanisme », Françoise Fromonot classe cette démarche comme « urbanisme de révélation » : « une seconde attitude consiste au contraire à travailler à partir des lieux d’intervention, pour puiser dans leur substrat (géographique, historique, symbolique…) les principes mêmes de leur transformation. Chaque site est ainsi amené à engendrer localement, par extrapolation, le programme de sa propre évolution. Cet urbanisme de révélation est d’abord, depuis la naissance de l’ecological planning aux USA, l’apanage de certains paysagistes, mais aussi d’une génération montante d’architectes urbanistes dont les préoccupations mettent en avant les notions d’«usage», d’ «aménagement du territoire» et d’«environnement durable». Les principaux acteurs du Triangle Vert, qui sont paysagistes et urbanistes, sont dans cette optique. En tant que professionnels, ils ont développé des philosophies et tentent de concevoir des projets durables. Le territoire du Triangle Vert est un lieu d’expérimentation et d’applications de leurs théories.

Le Triangle Vert s’appuie sur le site mais également sur les différents acteurs. Le programme est à inventer en totalité, sans espaces prédéfinis de façon formelle. Françoise Fromonot se pose la question d’une quatrième voie : « A partir de leur critique de ces trois familles de démarches projectuelles, peut-on tenter de les dépasser pour identifier et définir un urbanisme d’un quatrième type, qui conjuguerait l’attention envers la réalité des sites et la nécessité de leur transformation programmatique sans pour autant recourir à la médiation d’espaces publics formellement préconçus ? Une conduite du projet ouverte, qui ferait fusionner les préoccupations symétriques de révélation et de programmation sans la prothèse anachronique de la «composition» ? Une démarche capable comme telle de poursuivre la dynamique d’une histoire dont aucun héritage ne serait a priori exclu ? Un urbanisme inclassable, au fond, impossible à figer en modèle, opportuniste et spécifique, qui engendrerait sans l’intermédiaire d’une démarche historicisante le site par le programme et le programme par le site ? » Ainsi, l’urbanisme du triangle vert rejoint « l’hypothèse d’une quatrième voie, définie comme un ensemble de stratégies parentes, alternatives aux trois autres, qui conjuguerait dans la durée l’attention aux lieux et leur transformation programmatique : un urbanisme de situation ? ». En effet, le Triangle Vert s’emploie à créer une nouvelle façon de concevoir la ville. L’urbanisme devient affaire de tous, à travers les échanges démocratiques. Le citoyen redevient acteur de son environnement urbain et paysagé, de la vie politique de sa ville. Il est intéressant de voir comment les habitants peuvent participer à ces débats politiques, urbains et paysagés. De plus, dans le cas du triangle vert, ce sont des élus mais aussi des professionnels de la ville et du paysage qui se sont investis pour penser leurs territoires. Ainsi, de cette expérience, il nous est prouvé que la collaboration entre professionnels du territoire et usagers peut apporter de véritables solutions pour le devenir de la ville. Pour aller encore plus loin, ces actions territoriales amènent à repenser la société, son organisation, les politiques qui gravitent autour de ces espaces (par exemple, revenir aux circuits courts du producteur au consommateur).

Le Triangle Vert est un projet exemplaire d’urbanisme durable. Il en regroupe tous les thèmes : concertation des habitants, réponses aux problématiques urbaines comme l’étalement urbain, le mitage, la recherche d’une densité urbaine raisonnée et contrôlée, les transports doux, préservation et mise en valeur de l’agriculture, du paysage, sensibilisation et participation des usagers, réponses aux problématiques économiques comme les circuits courts, viabilité des entreprises locales… Il s’agit d’un projet se développant à plusieurs échelles, nationale et locale, d’un projet global qui rassemble tous les acteurs du territoire, et s’appuie sur le site comme premier outil de projet.


Le principe du Développement Durable appliqué au Triangle Vert ©Globarchi Association

Pour en savoir plus :
Le site internet du Triangle Vert : http://www.trianglevert.org/


vendredi 25 mai 2012

Un orphelinat en Thaïlande


© Pasi Aalto
Tyin tegnestue est constitué de deux étudiants de l’école d’architecture NTNU en Norvège, Andreas Grøntvedt et Yashar Handstad. Arrivés à la fin de leurs études, ces deux étudiants ont conçu un projet pour un orphelinat en Thaïlande dans le village de Noh Bo. L’orphelinat construit dans ce village par l’étudiante Ole Jørgen Edna en 2006, manque de place et il est nécessaire de pouvoir loger tous les enfants. C’est alors que les deux jeunes étudiants de Trondheim décident de reprendre le projet en construisant des hébergements. Le projet est ambitieux, mais les professeurs et l’école prétendent que leur réalisation est inenvisageable pour leur diplôme. Andreas et Yashar, passionnés par ce projet décident de laisser tomber leurs études momentanément pour entreprendre leur projet en Thaïlande.

Le défit du projet était de construire pour un coût modique et très rapidement de quoi héberger les enfants. Confrontée à l’inconnu, l’équipe a dû faire face à de nombreuses difficultés. En choisissant d’utiliser des matériaux locaux ou délaissés, les architectes réalisèrent plus qu’une habitation, mais une architecture adaptée à son contexte. En effet, le site se trouvant à proximité d’une forêt, ils ont opté pour une structure bois avec parois, couvertures et éléments intérieurs en bambou, abondamment disponible sur place. Pour les aider dans leur projet, les jeunes étudiants choisirent de construire avec la population locale. Des cours pour former la population locale à la maçonnerie, ou au tissage par exemple ont été mis en place, et c’est en expérimentant sur place, au jour le jour, avec leurs connaissances et celles des locaux que le projet a pris forme.

De part leur apparence, les bâtiments ont été renommés en “The Butterfly Houses” (les maisons papillons), soit Soe Ker Tie en langage local. Les techniques locales de constructions en bambou ont été réutilisées. La forme du toit permet une ventilation naturelle. De plus, cette forme permet de récupérer les eaux de pluie, ce qui s’avère très utile dans cette région du monde où alternent saisons de pluies et saisons sèches.
© Pasi Aalto
TYIN a été créé dans la volonté d’aider l’organisation NGO qui travaillait en Thailande avec l’ethnie de réfugiés Karen, qui souffre de la persécution de Rangoon. Dans le village de Noh Bo, de nombreux enfants orphelins se trouvaient dans une grande misère. L’objectif du projet était de tenter d’offrir à ces enfants un meilleur cadre de vie. Les architectes ont donc décidé de construire plusieurs petits pavillons pour que chaque enfant ait un lieu personnel, intime, au sein d’un quartier où ils puissent se retrouver et jouer.

Ce superbe projet alliant jeunes architectes et villageois bénévoles a été réalisé en quatre mois seulement et pour 9 500 euros. Andreas Gjersten et Yashar Hanstad voient dans l’architecture un moyen de développement pour des communautés pauvres. Leur approche architecturale les a amenés à concevoir des projets durables et adaptés aux spécificités locales. Leur projet a été primé et largement publié pour sa beauté et sa maturité, ce qui a permis aux jeunes architectes norvégiens de se faire connaître mondialement.



Pour aller plus loin : 
- Le site internet de Tyin tegnestue : http://www.tyintegnestue.no/

© Pasi Aalto
© Pasi Aalto
© Pasi Aalto
© Pasi Aalto
© Pasi Aalto
© Pasi Aalto
Perpestive © Tyin tegnestue arkitekter
Coupe © Tyin tegnestue arkitekter
Implantation © Tyin tegnestue arkitekter


vendredi 18 mai 2012

Un projet in-situ sur les Iles Lofoten

Concevoir un projet architectural dans le paysage Norvégien des Iles Lofoten prend obligatoirement une dimension remarquable. L’agence Snøhetta a conçu en 2007 une aire de stationnement sur la route touristique E10, près du village d’Eggum entre la mer Vestvågøy et les montagnes escarpées. Cette bourgade, autrefois peuplée par des pêcheurs, est encore habitée par bon nombre de personnes. C’est une place connue pour observer l’été venu le soleil de minuit.

Le projet dans son site © Jarle Wæhler, Statens vegvesen

Le projet se situe à la sortie d’Eggum, à la colline de Kvalhausen, utilisée pendant la seconde guerre mondiale comme station de radar par les forces Allemandes.

Le programme pour les architectes était de construire un espace de stationnement, des toilettes et une cuisine pour les visiteurs très nombreux l’été . Le choix du bâtiment a été déterminé par le site. Les architectes ont pris le parti de venir s’implanter discrètement « sous » la station de radar. L’architecture, d’une surface au sol de 59m², est sobre. Une construction de bois semble sortir du dessous de la colline. Le plan symétrique est très simple. L’espace principal du projet est une salle « polyvalente » d’une surface carrée de 20 m ², équipé d’une cuisine. Une large baie vitrée cadre sur l’extérieur. Un cadre en béton, jouant le rôle de mur de soutènement, encadre le volume de bois et permet l’accès de part et d’autre de la salle polyvalente au local technique et aux deux toilettes (enfants, adultes et handicapés). En Norvège, il est normal que les toilettes soient systématiquement équipées pour les handicapés dans les espaces publics. Il n’y a pas de ségrégation entre non-valides et valides comme on le retrouve malheureusement systématiquement en France. Les murs de cette construction ainsi que la toiture terrasse sont en ossature bois. Le mur qui sépare les toilettes est en béton car il sert d’appui au cadre en béton. Le sol intérieur est totalement en béton ciré.

Le mur de gabion étagé raccorde le bâtiment à l’aménagement paysager. Ce dernier a été rempli avec de la pierre provenant de l’excavation pour la construction de l’édifice et semble dialoguer avec les ruines de la station radar. Il sépare la construction du parking en formant un amphithéâtre. Le volume de bois contraste avec son environnement. Le parement est constitué de planches de bois flottés recueillies sur la plage toute proche. Ils se retournent en toiture pour former un volume pur, sans acrotères.

Ce projet frappe par sa simplicité, sa sensibilité et par la place laissée à son environnement. Le coût global du projet avec l’aménagement paysager de 5500m² est de 44 mille euros. L’agence Snøhetta nous démontre par son imagination et la subtilité de sa réponse, que faire de l’architecture s’inscrivant dans son site est simple et non onéreuse. Même avec des matériaux de récupération, les architectes sont arrivés à un résultat étonnant par sa précision et son esthétique.


Pour aller plus loin:
Le site internet de l'agence Snøhetta : http://www.snoarc.no/

Le volume de bois semble sortir de sous la colline
© 
Steinar Skaar, Statens vegvesen
La casquette béton abrite l'accès aux toilettes et au local technique © Snøhetta
Le mur de gabion forme un amphithéâtre © Snøhetta
L’amphithéâtre © Jarle Wæhler, Statens vegvesen  
L'implantation discrète du bâtiment © Snøhetta 
Paysage sublime des Iles Lofoten depuis le projet © Snøhetta 
Plan de masse © Snøhetta 
Plan général © Snøhetta
Coupes © Snøhetta

jeudi 17 mai 2012

Le Lieu Unique

Patrick Bouchain fabrique et transforme des friches industrielles en lieux de vie et de culture, par la grâce d’interventions minimales, lieux de création artistique. Il revient à  l’essentiel dans ses projets. Une longue pratique du cirque et du spectacle forain a sûrement amené cet architecte à s’émerveiller avec peu. Chercher le lieu adéquat, porter son attention à son atmosphère, construire vite et bon marché, libérer les usages pour révéler les lieux, les espaces.

© Cyrille Weiner

Pour créer ces ambiances uniques, il aime s’entourer de spécialistes : la botaniste Liliana Motta, le paysagiste Gilles Clément, l’architecte Loïc Julienne, l’artiste Daniel Buren, le designer Philippe Stark…

A la question de la durée de vie d’un bâtiment dans un contexte d’architecture durable, Patrick Bouchain répond par une architecture économe, audacieuse, évolutive, démontable, mobile, itinérante, éphémère… Selon lui, une architecture durable est une architecture, « ouverte »,  « transformable ». « Elle doit accueillir la vie et ses aléas. ».

Ce spécialiste de la réappropriation des délaissés urbains et des friches a notamment conçu le Lieu Unique à Nantes, sur le site de l’ancienne usine de biscuits : LU.

Patrick Bouchain à réhabilité cette friche en s’appuyant sur les éléments du site, la tour d’inspiration art nouveau, les restes de l’ère industrielle, et les trois principes fondateurs du projet initial voulu par le directeur du Lieu Unique, Jean Blaise : Lieu Unique, Lieu Utopique, Lieu Utile.

Ainsi, les espaces industriels sont devenus des espaces de vie, le lieu Unique est devenu un lieu emblématique dans la ville facilitant le passage entre la vieille ville et les nouveaux quartiers.

Pour Patrick Bouchain, le moment du chantier est le moment de la fabrication de l’architecture, lieu du savoir partagé. Ainsi le projet se construit sur le site, première source d’inspiration, et en relation étroite avec les habitants et les ouvriers. Ainsi, des ouvriers en bâtiment maliens ont apporté leur savoir faire sur ce chantier, dans un « échange équitable », symbole du renouveau des relations entre Nantes et l’Afrique.

Le Lieu Unique, accueille des activités culturelles mais aussi une crèche, un hammam, une boite de nuit… devenant ainsi un véritable lieu de vie.

Sur la façade de la salle de spectacle constituée d’étagères, vingt mille objets offerts par des Nantais ont été entreposés. La façade sera rouverte en 2100 et les futurs habitants pourront découvrir les objets déposés.

Nous pouvons citer parmi les réalisations culturelles de Patrick Bouchain : le Théâtre Zingaro, l’Académie Fratellini, l’Académie du spectacle équestre de Versailles ou la Condition Publique à Roubaix.

Pour aller plus loin :
- Cyrille Weiner photographie : www.cyrilleweiner.com


© Cyrille Weiner
© Cyrille Weiner
© Cyrille Weiner
© Cyrille Weiner
© Cyrille Weiner


mercredi 9 mai 2012

Habiter un silo à pétrole


© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
C’est une réalité, les réserves d’hydrocarbure s’épuisent. Nous aurons dans quelques décennies une pénurie, délaissant les raffineries et les silos à pétrole. Les Hommes vont devoir se tourner encore d’avantage vers les énergies renouvelables ! Face à cela, le groupe d’architectes danois « Pinkcloud » a réfléchi au recyclage de ces silos pour en faire… des logements!


Ce collectif de cinq jeunes architectes a été fondé à Copenhague. Selon eux, il existe environ 49 000 silos dans 660 raffineries à travers le monde. Ces silos sont entièrement pressurisés, étanches à l'eau et construits pour satisfaire aux normes industrielles. Couplé à cela, la croissance démographique mondiale est en perpétuelle expansion. Nous avons franchi le seuil des 7 milliards d’individus sur terre. 232 000 personnes naissent chaque jour et des études actuelles prévoient 9 milliards d’habitants d’ici 2050 ! Le logement est donc un défi non seulement pour la France mais pour le monde entier.


Ces architectes ont donc eu l’idée originale d’imaginer des logements dans des silos à pétrole qui pourraient abriter chacun plusieurs familles. En plus d’une économie financière et de matière, la forme sphérique des silos est idéale pour les apports lumineux et pour la thermique de l’ouvrage. Des panneaux photovoltaïques et solaires ont été placés en façade afin de fournir en énergie et en eau chaude les habitants. Une ventilation passive régule la température de l’intérieur. Les eaux de pluie sont récupérées par un système de collecte. Ces silos seront passifs : ils produiront plus d’énergie qu’ils n’en consommeront. Ils seront de plus assemblés en usine. Cela permettra encore une économie financière mais également un gain de temps à la construction.

© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
Il existe plusieurs tailles et modèles de silos à pétrole. Nous pouvons prendre exemple d’un ouvrage « type » pouvant recevoir 12 habitants. Ce dernier est réparti sur trois niveaux accessibles par un ascenseur central et par un escalier extérieur allant au jardin sur la toiture accessible. Tous les espaces de vies et de jours sont organisés de manière circulaire. Des murs végétaux servent à assainir l’air ambiant dans les logements. L’appartement du premier niveau mesure 90m² (2 personnes), celui du deuxième niveau 180m² (4 personnes) puis celui du troisième étage, 225m² (6 personnes). Au total, 588 milles personnes pourraient y être logées.

Ces silos peuvent être considérés comme des unités constituant un ensemble. Ils seraient connectés entre eux mais également aux divers réseaux comme des voies cyclables, des réseaux électriques (…). Le surplus d’énergie alimenterait ainsi l’ensemble des bâtiments.

Un projet en somme novateur qui nous démontre qu’avec beaucoup d’imagination, sans tomber dans l’utopie, nous pouvons concevoir des projets d’habitats écologiques à partir de la récupération. Après tout, ces silos ne sont-ils pas mieux ici en servant d’habitats pour des milliers de personnes, plutôt que de stocker une énergie polluante sans avenir ?


Le site internet du collectif "Pinkcloud" : www.pinkcloud.dk

© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0
© Pink Cloud, CC by-nc-nd 3.0